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Direct Matin – 22/10/2009
Antoine Grumbach trace les contours de Seine Métropole
La Seine est la grande affaire d’Antoine Grumbach depuis sa sélection parmi les dix équipes conviées en 2007 à réfléchir à la physionomie de l’agglomération parisienne dans trente ans. C’est même sa cause personnelle depuis que Nicolas Sarkozy a largement cité dans un discours, fin avril, sa proposition d’ordonner le développement de la métropole autour de l’«axe nourricier» du fleuve jusqu’au Havre. Depuis, Antoine Grumbach passe son temps à défendre Seine Métropole. Il s’est lancé dans une grande tournée de réunions publiques où il peut mesurer «l’empathie populaire» que déclenche son projet. L’urbaniste a pu y déposer toutes les convictions, les expériences et toutes les lectures charriées par sa longue carrière. A sa source, il y a l’engagement hérité de l’histoire d’une famille juive et résistante. Antoine Grumbach est né «par hasard» à Oran en janvier 1942. Ses parents avaient fui la métropole et cherchaient à rejoindre le général de Gaulle en embarquant dans un port d’Afrique du Nord. Sur dénonciation, son père a été livré par la police française aux Allemands. Il est mort en déportation. «Cette culture de la Résistance est structurante chez moi. J’ai appris à me bagarrer très jeune», affirme l’architecte. Ce goût du combat politique se retrouve chez le jeune dirigeant de l’Unef qui, dès 1964, mène la grève aux Beaux-arts pour y dépoussiérer les études d’architecture. Il est le premier élève à obtenir son diplôme en réalisant une étude sur l’espace public. Dans les quartiers difficiles où il est intervenu, l’architecte s’est toujours efforcé de «restaurer cette évidence, qui a tendance à se perdre, d’un espace commun.» Cet engagement est canalisé par deux rives. D’un côté, la culture. «Grumbach c’est mon Wikipédia, confie l’architecte Roland Castro, défenseur du projet Grand Paris défendu par l’Elysée et ami d’Antoine Grumbach. Comme je ne vais pas sur Internet, je m’adresse toujours à lui quand j’ai une demande précise.» L’architecte n’avance jamais un argument sans citer un livre. C’est en lisant Michelet, il y a cinq ans, qu’il a trouvé la citation de Bonaparte à l’origine de son travail sur Seine Métropole : «Paris, Rouen, Le Havre, une seule et même ville dont la Seine est… la grande rue !» L’autre rive est constituée par l’histoire et la géographie. Cette obsession du contexte le différencie des architectes stars, fabricants de très beaux objets, alors que lui se voit avant tout comme un «réparateur». Pour Seine Métropole, l’architecte a loué un minibus et emmené ses élèves parcourir chaque chemin de la vallée. «Le fleuve rend à la métropole l’identité que l’expansion radioconcentrique lui a fait perdre, analyse-t-il. Toutes les grandes villes ont un débouché maritime.» Face à l’hostilité des caciques socialistes des deux régions normandes, Antoine Grumbach, soutenu par le président de la République et le maire UMP du Havre, se moque de passer pour le maillon urbanistique de l’ouverture sarkozyenne. «Je reste de gauche, assure-t-il. Mais les socialistes ont trop tendance à s’enfermer dans une opposition stérile. Et puis que pèsent ces calculs politiciens face à la nécessité d’avancer sur un projet qui va s’étendre sur quarante années ?» _
Jérôme Fenoglio
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